Critiques
Seriesaddict.fr par Charlotte Papet | 17
Résumé
Alors que Walt change de vie et se retrouve face à lui-même, sa famille accuse le coup de la réalité. Jesse, quant à lui, fait tout pour retrouver sa liberté.
Après Ozymandias, l’épisode le plus réussi et le plus intense de Breaking Bad jusqu’à maintenant, les scénaristes de la série s’offrent une petite pause tranquille avec ce nouvel épisode intitulé Granite State.
Il s’agit du dernier épisode avant le grand final de Breaking Bad qui sera diffusé dimanche prochain sur AMC. Autant dire que la pression est importante sur les épaules de l’équipe qui ont réussi avec brio leur dernier tournant. Un épisode de transition avant l’explosion.
Granite State nous emmène dans la solitude profonde de chaque personnage. Que ce soit physique ou mentale, cette solitude envahie leur vie et les noie dans une tristesse encore jamais aussi bien représentée à la télévision. Tous sont face à eux-mêmes, à leurs actions passées et se raccrochent à ce qu’ils peuvent. Walt à son argent et à son idée de subvenir à sa famille, Skyler à sa fille, Jesse à Brock et à sa mère… Dans cet épisode, tous ont perdu une petite partie de ce pour quoi ils vivent et c’est avec une sorte de déchirement que nous commençons, nous aussi, à laisser partir la série.
Jesse tout d’abord, toujours enfermé dans sa « prison » tente par tous les moyens de s’en échapper, à ses dépens. La vie de l’ex associé de Walt ne tient plus qu’à un pourcentage, celui par lequel tout a commencé, celui de la pureté de la métamphétamine qu’il fabrique avec Todd. Ce dernier, tel un pervers psychopathe, agit avec un sang-froid qui fait peur. La violence de ses actes mélangée à son amourette naïve et non-réciproque avec Lydia en fait une figure difficile à appréhender. Encore une jolie performance de la part des scénaristes qui ont travaillé avec précision le personnage mais aussi à l’acteur Jesse Plemons qu’on ne cite pas souvent. L’avenir de Jesse n’augure rien de bon. Tout peut encore arriver dans le dernier épisode.
Skyler, quant à elle, s’efforce de revenir à la réalité. Le regard dans le vide, il est clair que la vie de la femme de Walt ne sera plus jamais comme avant. Les conséquences des actes de son mari lui reviennent en pleine face, entre la peine qu’elle encourt et le presque kidnapping de Holly.
Walt, enfin, nous est montré dans une faiblesse extrême. L’homme qui avait tout pour lui et qui commandait les gens n’est plus qu’un misérable ermite qui ne peut même plus hausser le ton sans que sa maladie l’emporte. L’épisode sert ici de remise en place des rôles. Il redevient le petit chimiste qui ne sera jamais crédité pour l’entreprise qu’il a construite avec ses deux collègues d’antan, avec beaucoup moins d’argent et terriblement seul. La scène où il paie son homme de main pour une heure de distraction est à vous fendre le cœur.
Alors que nous pensions jusqu’au bout que Walt allait se rendre, les dernières minutes changent la donne et nous prépare pour le tout dernier épisode de Breaking Bad. Epoustouflant. Resterait-il toujours un peu de Heisenberg en Walt ?
Bilan
Breaking Bad nous offre un épisode de transition qui met en place les dernières actions de la série avant le grand final qui s’annonce épique.
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17 Commentaires
Le 25/09/2013 à 18h24
je critique pas la note de l’épisode mais si celui la a 10 l’épisode 14 dépasse alors les 10/10 :)
Le 25/09/2013 à 18h28
Que dire? Que c est un chef d oeuvre ? Que c est du très haut niveau? Que c est magistral? Que les acteurs sont absolument grands? Que c est la meilleure série que j ai vue? Que certains scénaristes devraient en prendre de la graine( je ne vise pas ici les tocards ayant détruit un tueur en série )! Je vais juste pour ma part dire merci pour cette série génialement apocalyptique!
Le 25/09/2013 à 18h32
"Alors que nous pensions jusqu’au bout que Walt allait se rendre"
ben non, son retour est annoncé depuis belle lurette ! (FFW au début du 5.9 notamment)
Le 25/09/2013 à 18h48
Je suis d'accord avec cette critique sauf.... épisode de transition??????!!!!!!!
Je pense que c'est passer à coté de beaucoup de choses que de le voir comme ça et pour plusieurs raisons. L'épisode est gorgé de symbolisme avec toute la mythologie de la série.
Le décalage entre la vision intérieur de Walt (qui met son chapeau et s'apprête à ressortir en Heisenberg) et la réalité de son corps qui le rattrape (tomorrow...) avec l'image de la perfusion qui remplace le chapeau d 'Heisenberg sur le porte-manteau.
Avec le fait que début c'est Heisenberg qui le maintien en vie et qui le fait tenir face au cancer (qui est se fait absent quand il est au top de son "empire" et qui revient quand le Walt familial reprend le dessus). Faible face à Saul, il tousse, n'a plu la même aura (Saul: it's over) mais seul la fierté et le besoin de reconnaissance sont capables de susciter d'aussi violente réaction chez lui.
La scène finale est pour moi la plus belle fin jusqu'ici avec le main theme laissé pour une fois jusqu'au bout. J'ai l'impression que le combat psychologique schizophrènique qu'il mène contre lui-même est enfin achevé, l'interview et ses nouvelles (la bluemeth est encore en circulation donc Jesse est vivant donc les Nazi se sont foutus de lui et lui ont volé son héritage + ses deux potes d'enfances qui le rabaisse encore une fois + la rupture finale avec la famille) sont le final push qui laisse ressortir ce personnage psychopathe, froid et calculateur (à l'inverse du Walt émotif qui disparait définitevement) qu'est Heisenberg.
Loin d'être un épisode de transition celui-ci se situe en droite ligne du précédent et achève la transformation définitive du personnage de Walt.
La fin va être terrible puisque le créateur se vante d'avoir créé le western du XXIe siècle (à juste titre selon moi), ça risque de finir en bouquet final
Le 25/09/2013 à 19h32
+1 Pingouin! Charlotte et Pingouin, tout cela est très bien dit.
Je n'ai pas grand chose à ajouter à ce que vous avez déjà très bien exprimé, si ce n'est que pour moi le grand final a déjà commencé avec l'épisode précédent et continue avec celui là. Nous avons assisté à la chute de Walt - qui après avoir quasiment abandonné la partie, retrouve au dernier moment un regain de motivation. L'heure de la VENGEANCE (un thème classique du western) va sonner dans la dernière partie !
Le 25/09/2013 à 19h55
pingouin .....ton commentaire est tout juste ENORME : toute la symbolique qui saute aux yeux quand tu la décris ...merci
mais juste one question: pourquoi le meurtre de l'ex copine de Jessie ???donc lui aussi a sombré dans le crazy ???
Le 25/09/2013 à 21h22
Quel talent ce pingouin ! très bon post, merci
Le 26/09/2013 à 11h09
Pingouin tu assure !
centaure : pourquoi le meurtre de l'ex copine de Jessie ?
Je dirais que sa montre la volonté de la bande nazi et surtout le froideur de Todd.... Concernant Jessie... je pense que dorénavant il n'a plus rien a perdre...et donne une bonne raison a s'allier a Heisenberg pour éliminer la Bande.
Le 26/09/2013 à 11h13
Pour l'épisode de transition, je pense que s'en est un quand même, dans le sens où il n'y a pas de nouvelles choses justement et que les statuts de chacun s'installent pour exploser dans le dernier épisode.
Le terme n'était pas péjoratif mais plutôt descriptif.
Après effectivement, l'épisode peut être pris sous un angle différent ;)
Le 26/09/2013 à 12h49
Un indice : quel personnage est accro a la cigarette ?
Le 26/09/2013 à 13h14
Cette série aura jusqu'à la fin suscité en moi les sentiments les plus opposés : entre fascination et distance. Cela tient sans doute à la variété des approches : tantôt racoleuse et border line dans sa violence, tantôt très fine dans la peinture des caractères. J'espère qu'en dépit d'une "faute de goît" scénaristique (le meurtre par Todd de qui vous savez), pour moi bien inutile, le final restera contrôlé (mais j'en doute au vu de l'importance prise par le groupe des néo-nazis). A dimanche donc !
Jacques
Le 26/09/2013 à 19h33
@Charlotte, sorry j'avais compris ça avec une connotation légèrement péjorative.
@Centaure222 Ils tuent Andrea en représailles de la tentative d'évasion de Jesse. En affichant la photo d'Andrea et Brook dans le lab ils lui disaient clairement qu'en cas d'entourloupe ils y passeraient pour le punir. Encore une fois le côté impulsif de Jesse qui ne réfléchit jamais à ses actes est lourd de conséquences.
@Jacques. Ce qui m'amène à revenir sur ce que tu as dit. L'exécution d'Andrea par Todd n'a rien d'une faute de goût c'est la conséquence logique du comportement des Nazi depuis le début qui tuent plus par plaisir sadique que par nécessité. Le personnage de Todd (incroyablement interprété)est là pour contraster avec celui de Jesse. L'histoire nous montre que si Todd avait été avec Walt depuis le début celui-ci serait toujours à la tête de son "empire". Jesse nourrit une véritable admiration pour Walt et envie beaucoup Jesse de tenir cette place auprès de lui. On peut dire que malgré sa sociopathie (encore un!) il a gardé un esprit d'enfant (quand il raconte le casse du siècle sur le train on dirait qu'il raconte une journée à Disneyland à son oncle). Il idéalise complètement cette vie à l'inverse d'un Jesse (plutôt normal lui) qui, avec le même côté gamin tout au long de la série, a fini par littéralement péter un câble et être rongé par la culpabilité. Todd vit dans l'illusion qu'il va pouvoir former un trio avec Jesse et Walt et régner sur le sud-ouest (à l'inverse de son oncle il ne s'arrête pas à l'argent mais recherche le vrai pouvoir, comme Walt, celui d'une réputation et d'un business mondialisé. On le voit quand il apporte de la glace à Jesse on a l'impression qu'il veut être son ami alors que celui-ci est son esclave, scène surréaliste).
Bref pour finir Todd est le Jesse que Jesse aurait du être pour que Heisenberg connaisse un règne aussi long que Gus, quelqu'un qui ne pleurniche pas quand il faut passer à l'acte (cf le ptsd de Jesse après le meurtre de Gale)
Le 27/09/2013 à 12h08
@ PingouinBishop. Bonjour, merci pour votre argumentation que j'entend bien.
Je suis globalement d'accord sur ce que vous dites. Il me semble que la gêne ou le malaise que suscite en moi cette série néanmoins remarquable, c'est son approche de la violence. Certes, le trafic de drogue à cette échelle ne ressemble pas à une réunion tupperware de bisounours et la violence est consubstantielle à cette activité, pour dire très vite.
Il me semble néanmoins que je suis gêné par le surlignage de la sociopathie des néos-nazis et que scénaristiquement parlant, ce meurtre n'était pas nécessaire pour nous faire saisir l'épouvante de ces personnages (et encore plus, la monstrueuse civilité de Todd), par ailleurs, ce meurtre s'inscrit selon moi dans une sorte d'acharnement sur le personnage de Jesse dont le chemin de croix semble interminable. On peut penner ce que l'on veut des qualités de cette série (que je ne nie pas du tout !) mais il me semble qu'à l'instar des films par exemple des Frères Coen , on ne peut éviter la question des usages des représentations (sur la forme et le contenu), de la violence. Au fond, je crois que mes réserves sont en grande partie liées à ce refus d'adhérer totalement à une lecture trop symbolique de cette histoire au profit d'une lecture plus réaliste.
Bien à vous,
Jacques
Le 27/09/2013 à 13h27
@Jacques. L'un des principes fondateurs de la série est que toute action à ses conséquences, même dix épisodes, une saison plus loin. C'est ce qui fait le génie de son écriture, chaque détail se doit donc d'être scruté et chaque re-run nous fait voir des choses que l'ont avait pas vu précédemment (un peu comme The Usual Suspects). Dans ce cas l'exécution était inévitable sinon cela serait venu entacher une ligne éditoriale impeccable jusqu'ici.
Après concernant le personnage de Jesse (qui est mon personnage préféré je le précise) bien que ça me brise le coeur, son chemin de croix est un des messages forts qui ressort directement du thème principal de la série. Celle-ci a une vraie dimension ontologique, qu'est ce qui fait que l'humain est humain? et j'ajouterai qu'est qui fait que l'homme social a un comportement jugé conforme par la société? Le postulat de départ est qu'il existe deux mondes qui coexistent, celui dans lequel vous et moi vivons, le monde civil dirons, celui de la "normalité" en tant qu'elle est définie par la masse et celui qui crime très organisé qui vit caché en plein jour (le thème hiding in plain sight revient très souvent, comme Gus, Walt, Todd et son équipe de dératiseur). Ces mondes ont chacun leurs codes et n'ont pas vocation à se rencontrer. Après tout Gus aurait pu passer sa vie comme comme parrain de son syndicat cela n'aurait dérangé personne du monde civil.
Mais quand ces deux mondes s'entrechoquent, que des personnes passent du monde visible au monde invisible, si elles ne maitrisent pas rapidement les nouveaux codes, elles disparaissent rapidement (sans Walt, Jesse aurait fini comme Combo). Donc son chemin de croix est la dure expérience de cet apprentissage (d'ailleurs il n'apprend pas beaucoup car ses actions irréfléchies entrainent encore la mort d'un proche). La violence est mise au service du réalisme. C'est un agneau perdu dans un monde de loup.
Après concernant le symbolisme, Vince G. a créé une oeuvre qu'il a voulu symbolique - voire sur-symbolique parfois. Il a voulu inventé - ou réinventé le western moderne - qui est déjà un genre chargé de symboles en lui-même. Après il en a ajouté des films de mafia ou de cartel. Enfin il a voulu créer sa propre mythologie, son propre monde qui est très crédible. Je ne sais pas si vous avez lu ça mais il y a des sites qui repèrent ces clins d'oeil ou symboles à travers les saisons. Jesse se rase les cheveux quand il adopte Walt comme son père spirituel et le mimétisme est à ce moment très poussé entre les deux, Walt adopte des traits de caractères de tous les personnages qu'il a vaincu etc etc.
Bref le symbolisme est très important, c'est ce qui en fait une oeuvre unique, et je trouve que ça ne sacrifie en rien au réalisme bien au contraire.
Le 27/09/2013 à 19h28
Dommage trop de fautes sinon très bonne critique as usual :)
Le 27/09/2013 à 19h43
Je suis moins convaincu par vos arguments cette fois. Il me semble que vous surinterprétez cette histoire (mais votre analyse est sans nul doute intéressante) parce que précisément sa dimension symbolique s'y prête. je ne vois nul réalisme social dans la série, sinon au cours de la première saison, qui évoque indirectement les contradictions inhérentes au "rêve américain" , celles où un professeur de collège confronté aux limites de la protection socale de son pays est conduit, après avoir cumuler un double emploi dans une station de lavage, à prendre ce système à revers et de la manière la plus cynique qui soit.
Encore une fois, je comprend les logiques qui sous tendent l'évolution des personnages et de leur scaractères. Il n'en reste pas moins que la question de la représentation formellle de la violence et de ses usages dans la série reste à être interrogée.
Le 27/09/2013 à 19h52
PS: mon personnage préféré est aussi celui de Jesse. C'est pour cela qu'il me tient à coeur !
Je ne vous suis pas trop quand vous parlez de son comportement "irréfléchi". Il me semble que Jesse a atteint une maturité et une capacité de réflexion depuis longtemps dans la série. Il est au contraire, selon moi, celui qui tente (je dis bien tente) d'agir de manière rationnelle et de se déprendre de l'engrenage fatal. Les conséquences funestes ne sont pas dues à ses actes mais aux conditions extêmes dans lesquelles il se trouvent et sur lesquelles il ne peut avoir prise autrement qu'en mettant en danger de mort, par effet de conséquence, d'autres que lui. Je ne sais pas si je me fais bien comprendre mais enfin voilà, c'est un peu mon opinion.
Bien à vous,
Jacques